Le djihad de l'imam Ahmed dit « Grañ », « le Gaucher »
1.17x0.88 (Longueur x hauteur)
L'imam Ahmed lança une guerre de conquête ou djihad contre le royaume chrétien d'Éthiopie dans la décennie 1530. En quelques années, ses armées décimèrent le pays chrétien, brûlant les églises, pillant, tuant. Si la victoire finale revint aux armées chrétiennes, cette longue période de guerre modifia durablement les équilibres géo-politiques de l'Éthiopie et a marqué la construction de l'histoire nationale chrétienne pour les siècles suivants. On voit sur ce tableau les armées portugaises venant à la rescousse des chrétiens d'Éthiopie, portant des casques semblables à ceux que les peintres attribuent aux soldats italiens qui leur étaient plus contemporains. L'imam Ahmed « Grañ » est représenté démesurément grand, abattant un arbre d'un coup de sabre. En effet, la tradition orale en a gardé une image d'homme aux forces surnaturelles et de nombreuses légendes lui attribuent l'érection de mégalithes ou des phénomènes naturels particuliers sur l'ensemble des hauts-plateaux chrétiens ainsi qu'au delà de la rive sud de l'Abbay.
60 – Le règne et la mort du roi des rois Téwodros - Berhanu Yimane
Le suicide du roi Téwodros face à l’armée anglaise (1868)
1.82x0.91 (Longueur x hauteur)
Le triptique raconte l’histoire de Téwodros, un simple guerrier qui s’imposa par les armes pour devenir roi des rois d’Ethiopie en 1855 et centraliser un pouvoir politique alors affaibli. Il se suicida à Maqdala en 1868 à l’arrivée des troupes britanniques - représentées massivement sur la dernière scène – venues délivrer des otages étrangers détenus par le roi.
La scène du couronnement, au centre, a sans doute été inspirée d’une photographie du sacre de son lointain successeur, Haïlé Sélassié, en 1930.
23 – Bataille d'Adwa - copie réalisée par Shibeshi Esheté en 2010 d'une toile que possède Jacques Dubois, non signée, provenant du Tigray, achetée au début des années 1970
Bataille d'Adwa (1896)
1.82x0.91 (Longueur x hauteur)
En 1896, les armées éthiopiennes du roi Ménélik (1889-1913) infligent une défaite cuisante aux troupes italiennes. La bataille, très rapide, se déroule à Adwa et fut décisive dans la sauvegarde de l'indépendance politique et territoriale de l'Éthiopie jusqu'en 1936. Très peu de temps après la victoire, ce symbole politique fort fut mis en image, avec certains éléments iconographiques qui seront répétés tout au long du XXe siècle, tels que l'apparition de saint Georges guidant l'armée abyssine.
Cette peinture suit un modèle qui se mit en place après la libération en 1941 et dont il existe plusieurs versions dans la collection Denis Gérard, quatre étant signées de Berhanu Yimane et une de Qana. Les éléments communs à ce modèle sont : Saint Georges apparaissant dans un cercle vert-jaune-rouge pour guider les armées éthiopiennes vers la bataille ; la reine Taytu armée d'un pistolet, chevauchant aux côtés de son époux le souverain Ménélik ; un affrontement entre les armées abyssines et les armées italiennes structuré selon deux lignes découpant un triangle au centre de la toile ; une opposition entre les têtes sombres des soldats éthiopiens et les silhouettes blanches des Italiens casqués.
La toile choisie ici présente quelques particularités notables : la mort sur le champ de bataille du dajjazmatch Bašah Aboyé tombant de son cheval, peint avec un réalisme peu commun ; des joueurs de timbales (nagarit) et de trompe (meleket) qui accompagnaient effectivement les armées sur le champ de bataille ; la présence de la cavalerie qui joua un rôle important dans cette bataille. Un grand nombre de légendes permettent d'identifier les principaux chefs militaires éthiopiens ainsi que Ménélik et le général italien Baratieri, et deux églises d'Adwa.
Les trois personnages les plus valorisés sont le ras Alula "le protecteur", qui saisit un gradé italien ayant un pansement à la main. On note son couvre chef symbolique fait du drapeau éthiopien nimbant sa tête. Puis le ras Makonnen, immense, représenté majestueusement sur son cheval. Enfin le ras Hagos, lui aussi se saisissant d'un gradé italien.
Légendes, de bas en haut et de gauche à droite : « atsé Menilek », « ras Abata », « ras Damsaw », « dajjazmatcḩ Bašah Aboyé », « ras Mangaša Atikam », « Adwa Sellasé », « ras Mangaša Yohannes », « fitawrari Gabayahu », « Saint Georges », « le‘ul ras Makonnen », « ras Hagos », « Adwa Giyorgis », « ras Alula ya-dengay mazgiya ya-maykafet ya-mayzaga, la porte en pierre qui ne s'ouvre ni ne se ferme, c'est-à-dire, "le protecteur" », « general Baratiyéri »,
76 – Les guerres de conquêtes du sud éthiopien par les armées de Ménélik (1889-1913) ("ya-Šanqela tornat") - peintre inconnu.
Guerre impériale contre les populations non-chrétiennes
1.93x0.82 (Longueur x hauteur)
Cette peinture représente un autre aspect de la politique guerrière des souverains éthiopiens chrétiens, les guerres contre les populations non chrétiennes, le terme générique de shanqala désignant les populations du sud-ouest de l'Éthiopie, frontaliers du Soudan, et ne professant pas une religion du Livre, bref, des « païens » et des « noirs », pour le dire tel que c'était pensé à l'époque. Ils furent razziés et réduits en esclavage jusqu'au début du XXe siècle, ce qui posa d'ailleurs un problème à Haïlé Sélassié à la Société des Nations. La pratique de l'esclavage a perduré après que des lois aient été mises en vigueur pour la faire cesser.
Ce tableau dépeint probablement les guerres menées lors du règne de Ménélik qui permirent d'étendre les frontières de l'État éthiopien vers le sud. Le déséquilibre entre les armes à feu des soldats impériaux et les arcs et flèches ou même les outils de paysan des peuples conquis est particulièrement mis en valeur ici.
Quelques détails à noter : une femme avec un enfant dans le dos frappant à la tête un soldat à coup d'herminette ; un personnage fumant une pipe traditionnelle faite dans une calebasse, petit détail « ethnographique » montrant aussi la distance entre le peintre et la scène représentée. Au fond, en haut à droite, sont représentés les chefs traditionnels (balabat) des Shanqala. On voit aussi une scène d'émasculation, pratique courante des guerres éthiopiennes depuis la période médiévale, largement décrite dans les chroniques des souverains chrétiens. Si aujourd'hui les chrétiens imputent cette pratique aux peuples du sud et des basses-terres orientales, elle était en réalité pratiquée de longue date par les armées chrétiennes.
62 – L'attaque d'un train italien par le dajjazmatch Feqra Maryam ou la résistance lors de l'occupation italienne - Berhanu Yimane
Résistance à l'occupation italienne
1.89x0.87 (Longueur x hauteur) en mètre
La légende dit « dajjazmatch Feqra Maryam yamatawn fašasta [fasciste] Awaš lay getemaw anda tawagu", soit le "dajjazmatch Feqra Maryam a combattu l'envahisseur fasciste dans l'Awash".
Ce personnage célèbre était le chef des gardes du corps du prince héritier. Lorsque ce dernier gagne l'Angleterre au début de l'invasion italienne, en mai 1936, le dajjazmatch Feqra Maryam Yenadu entre en résistance et combat les armées italiennes sur le front oriental, tâchant notamment de pirater la ligne de chemin de fer. Il est tué en octobre 1936 et reste dans les mémoires comme un courageux résistant de la première heure.
La peinture représente une embuscade tendue par les résistants éthiopiens au niveau du pont du chemin de fer sur la rivière Awash.
61 – L'attentat contre Graziani et ses représailles - Berhanu Yimane
Résistance à l'occupation italienne
1.88x0.93 (Longueur x hauteur)
Cette toile au sujet fort rarement dépeint, donne à voir l'attentat perpétré par des résistants éthiopiens contre le général Graziani, nommé vice-roi de l'Éthiopie par Mussolini en mai 1936. Cette tentative d'assassinat manquée, réalisée par deux Érythréens en février 1937, fut suivi de représailles d'une extrême violence contre la population civile à Addis Abeba, notamment contre l'élite intellectuelle éthiopienne, et contre les moines du monastère de Dabra Libanos. Plus de cinq mille personnes y laissèrent la vie, plus de trois milles personnes furent emprisonnés et des centaines de membres de la noblesse déportés en Italie. La démesure de ces représailles a probablement conduit au remplacement de Graziani à la fin de l'année 1937.
légende : general Grasiyanen Ab[re]ham Dabotch-na Mo[ga]s Askidom ba-bo[m]benda aqosalatch « comment Abreham Dabotch et Mogas Asgedom ont lancé une bombe sur le général Graziani ».
Taliyanotch Addis Ababa katamawen enda aqalu. « Comment les Italiens massacrèrent dans la ville d'Addis Ababa. »